L’ atelier de dissémination des rapports de suivi des investissements publics, dans le secteur de la santé et de l’éducation, exercices budgétaires 2014 à 2019, par les organisations de la société civile (OSC), s’est tenu à l’hôtel Grand Lancaster(Ex Méridien), à Brazzaville, vendredi 16 juin 2023 ,sous le patronage du Ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État, M.Luc Joseph Okio.
Deux moments forts ont marqué cette cérémonie, à savoir la présentation, tour à tour, des rapports de suivi des investissements publics dans les secteurs de la santé et de l’éducation par les organisations de la société civile, et le débat suscité dans l’assistance par ces documents rendus publics. Concernant le premier rapport, portant sur le secteur de l’éducation, il est produit dans le cadre de la mise en œuvre de la convention signée en 2020 entre le Gouvernement représenté par le Ministère du Plan, de la Statistique et de l’Intégration Régionale, le Projet des Réformes Intégrées du Secteur Public ( PRISP) d’une part, et les Organisations de la Société Civile, d’autre part. Les OSC avaient pour mission de mesurer le niveau d’exécution des budgets d’investissements de 2014 à 2019 à travers le suivi des projets d’infrastructures et d’équipements prévus dans le domaine de l’éducation durant cette période.
Notons que le suivi des investissements publics a consisté à collecter les informations et à identifier les projets de construction, de réhabilitation et d’équipement des secteurs de l’éducation inscrit dans le budget de l’État pour la période allant de 2014 à 2019, auprès des structures administratives centrales et/ou déconcentrées sur toute l’étendue du territoire. Il découle de cette mission des OSC, notamment les constats suivants :
. Faiblesses des investissements consacrés au secteur de l’éducation hors enseignement supérieur soit 2,27% du budget global d’investissement de l’État qui est de 2.494.811.000.000FCFA pour les exercices budgétaires de 2014 à 2019;
. Faible taux d’exécution des dépenses d’investissement ordonnancées soit 44,6% d’exécution de la base d’ordonnancement ;
. Prévalence d’affectation des projets des investissements publics en milieu urbain par rapport à la zone rurale.Nombreux des projets enquêtés et budgétisés,echantillonés pendant cette mission de suivi budgétaire se trouvent en milieu urbain ;
. Au niveau de l’enseignement technique et professionnel,il y a presque autant d’équipements en bon état fonctionnels (41,5%) et en bon état non fonctionnels (41,3%).Au total,il y a plus d’équipements non fonctionnels (47,9%) que fonctionnels (43,6%);
. Plus de la moitié des projets (53%) arrêtés l’ont été pour des raisons autres que l’arrêt des financements ou la mauvaise gestion des fonds.Les répondants en ignorent les raisons.Il se pose là un problème de circulation de l’information au niveau des acteurs concernés par les projets ;
. Sur l’ensemble des projets achevés dans le secteur de l’éducation,81,42% sont conformes aux prévisions.Mais cette situation globale,on noté les observateurs, contient des particularités peu réjouissantes car Brazzaville compte 41,18% des ouvrages qui ne sont pas conformes aux prévisions.Par ailleurs, selon cette étude,un ouvrage sur deux réalisés dans le Pool,la Sangha et dans la Likouala ne sont pas conformes aux prévisions. Là encore, estiment les OSC, on peut interroger le dispositif de suivi-évaluation des investissements publics ;
.La faible performance des investissements publics dans le secteur de l’éducation, avancent les enquêteurs, peut s’expliquer par la stratégie fragmentée du secteur. En dépit de l’engagement envers la société civile, celui -ci n’est pas clairement reflété comme priorité dans la stratégie sectorielle, dans les projets de l’éducation du pays, ce qui entraîne un décalage entre la politique et les objectifs du secteur.
Le rapport de suivi des investissements publics dans le secteur de la santé, en ce qui le concerne, présente les résultats issus du suivi de l’exécution de 297 projets dont 227 de construction et 70 d’équipement. En effet, sur l’ensemble des projets de construction suivis,116 projets soit 51,10% sont jugés non démarrés et 111 soit 48,90 démarrés. Parmi ces derniers,19,82% sont achevés,03,08% en cours de réalisation et 25,99 arrêtés.
S’agissant de l’équipement,17 projets soit 24,3% ont été exécutés contre 53 projets soit 75,7% non exécutés. A travers le pays, peut-on lire dans le rapport des OSC, on observe des projets arrêtés, dont plusieurs sont à l’abandon. Parmi eux, les chantiers des hôpitaux généraux des dix chefs-lieux des départements sont les plus emblématiques. En dehors de Ouesso où on constat un entretien du site préparant une éventuelle reprise des travaux, les autres sont dans état plus ou moins d’abondon de leurs sites depuis environ six ans,le cas du centre de santé de Missafou dans le département du pool.Les investigations ont aussi montré que quelques structures finalisées sont dans le même cas.
On cite ici, entre autres, la construction du CSI de Porro finalisé, mais a l’abandon depuis plusieurs années, en raison de la mauvaise qualité des travaux. En outre, les descentes de terrain ont mis en évidence également certains projets pour lesquels les responsables des structures ont reçu la visite des délégations (agents du ministère et opérateur) Venues de Brazzaville pour annoncer leur réalisation. Mais jusqu’au passage des observateurs, rien n’a été fait. Ces derniers ont mentionné, pour illustration, la construction du CSI de Boyélé reporté dans trois exercices budgétaires (2014,2015 et 2016) pour un budget de
150 000 000FCFA .A en croire les OSC, ces situations, tout comme les autres qu’elles ont décrites dans leur rapport, sont les résultats de plusieurs facteurs auxquels il faut ajouter le manque de suivi de la part de l’État. Eu égard à toute les situations relevées par cette étude, notamment celles qui représentent des obstacles à l’efficacité et l’efficience de la dépense publique dans le secteur de la santé, les organisations de la société civile ont suggérés quelques bonnes pratiques pour améliorer la gestion des investissements publics.Aussi, elles recommandent :
- Au Ministère de la santé et de la population, entre autres,de: prendre des mesures nécessaires pour que les projets<< achevés non fonctionnels >> identifiés dans cette étude deviennent opérationnels; demander un audit de tous les projets arrêtés et non démarrés ; cartographier les projets à l’abandon sur tout le territoire national et planifier leur achèvement, en tenant compte des priorités et des besoins des localités.
- Au Ministère de l’économie et des finances et au ministère du budget, des comptes publics et portefeuille public de:Prioriser les dépenses sociales quelle que soit la situation des finances ;exiger des études de faisabilité préalables avant l’inscription d’un projet au budget, et laisser le pouvoir au ministère du plan de refuser un projet ; accélérer la transition vers l’organisation des budgets par programmes, et le transfert du pouvoir d’ordonnancement vers les ministres sectoriels, et d’en rendre compte annuellement à l’assemblée nationale et au public.
Le débat, quant à lui, s’est focalisé sur le processus de financement des projets d’infrastructures à l’abandon ou non réalisées, ainsi que sur toutes les institutions chargées de sanctionner tout auteur de détournement des deniers publics.